Cacophonie linguistique dans l’espace francophone montréalais, ou comment redéfinir la francophonie québécoise
DOI :
https://doi.org/10.29173/af6616Résumé
Cet article s’interroge sur la définition de la francophonie québécoise à partir de l’analyse de données empiriques recueillies dans une entreprise d’insertion pour immigrants à Montréal. Il vise à mettre en contraste le discours sur la langue de travail tel qu’il est articulé par le personnel administratif de cette entreprise et les choix langagiers des immigrants en formation dans ce même centre. Ces choix, ainsi que les discours qui s’y rapportent, ont été documentés à l’aide de transcriptions de plus de vingt-quatre heures de conversations spontanées enregistrées sur magnétophone, de dix heures d’observation participante et de quatre heures d’entrevues avec les membres du personnel. L’analyse porte particulièrement sur les choix linguistiques de ces immigrants. La présence de deux groupes linguistiques dominants leur permet de communiquer dans leur langue maternelle et d’ériger des barrières linguistiques assez étanches laissant peu de place à la communication intergroupe. Plusieurs éléments d’explication seront proposés. D’abord, la compétence approximative dans les langues officielles oblige les allophones à recourir à leur langue maternelle, même si cette pratique n’a pas que des répercussions positives. S’il est vrai que l’usage de la langue maternelle permet de maintenir les liens qui existent dans la communauté linguistique d’appartenance, elle rend l’intégration dans le milieu de travail, de l’aveu même des immigrants, plus difficile. Des raisons systémiques rendent compte de cette pratique. D’abord, le domaine d’emploi dont il est question ici ne valorise pas l’usage du français. De plus, le centre de formation s’efforce de maintenir une image francophone qui nuit aux stagiaires, car si en surface le français est la langue véhiculaire, la réalité requiert une stratégie d’intégration globale incluant l’apprentissage adéquat du français. En conséquence, le français n’est que peu accessible pour ces allophones et ne comporte pas suffisamment d’avantages pour qu’il devienne le choix normal et habituel au travail. Bref, les prérogatives économiques, c’est-à-dire la formation d’une main-d’œuvre manufacturière, sont priorisées au détriment de l’intégration linguistique.
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© Geneviève Maheux-Pelletier 2010
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